
Maurice Chevance, dit Chevance-Bertin, né le 6 mars 1910 à Nanteuil-le-Haudouin (Oise) et mort le 17 juin 1996 à Paris, est une figure majeure de la Résistance française pendant la Seconde Guerre mondiale. Militaire de carrière, engagé dans l’armée dès 1929 et officier dans l’infanterie coloniale, il devient un résistant de la première heure dès 1940, jouant un rôle clé dans l’organisation et la direction de mouvements de résistance en zone sud. Voici une biographie centrée sur son action dans la Résistance de 1940 à janvier 1945.
1940 : Les débuts dans la Résistance
En août 1940, alors qu’il est en congé d’armistice après la défaite française, Maurice Chevance est recruté par Henri Frenay, un pionnier de la Résistance, qui organise les premiers noyaux de résistance dans la région de Marseille. Chevance, alors officier de l’armée coloniale, apporte son expérience militaire et son sens de l’organisation. Il rejoint le mouvement naissant qui deviendra plus tard Combat, l’un des principaux mouvements de résistance en zone sud. Sous les pseudonymes Bertin, Barioz, Thuillier ou Vilars, il opère dans la clandestinité, notamment en Provence, où il est chargé de structurer les réseaux.
Chevance participe à la diffusion des idées résistantes et à la création de réseaux de renseignement et d’action. Il s’implique dans la rédaction et la distribution de tracts, ainsi que dans le recrutement de nouveaux membres. Dès novembre 1940, il fait partie du cercle rapproché de Frenay, aux côtés de figures comme Robert Guédon et Claude Bourdet, pour diffuser un manifeste appelant à la résistance.
1941-1942 : Montée en puissance dans Combat
En 1941, Chevance devient un cadre essentiel de Combat. Il est nommé membre du comité directeur du mouvement dès sa fondation en décembre 1941, puis directeur général pour la zone sud. Basé à Marseille, il organise des groupes de résistance, coordonne des actions de sabotage et développe des filières d’évasion pour les résistants et les prisonniers de guerre. Il contribue également à la création d’une entreprise de transport, servant de couverture pour les activités clandestines des officiers coloniaux impliqués dans la Résistance.
Son rôle s’étend à la coordination avec d’autres mouvements et à la collecte de renseignements pour les Alliés. En 1942, il rencontre Jean Moulin, envoyé de De Gaulle, à Marseille. Cette rencontre, où Moulin expose les plans de la France libre, marque profondément Chevance, qui dira avoir pleuré d’émotion face à cette vision d’une libération nationale. Chevance soutient l’unification des mouvements de résistance sous l’égide de Moulin et de De Gaulle, un processus complexe mais crucial.
1943 : Chef régional des MUR et évasions spectaculaires
En 1943, Combat fusionne avec d’autres mouvements (Franc-Tireur et Libération-Sud) pour former les Mouvements unis de la Résistance (MUR). Chevance devient le premier chef régional des MUR pour la région R2 (sud-est de la France, incluant la Provence). Il supervise des opérations de plus en plus audacieuses, comme des sabotages contre l’occupant allemand et le régime de Vichy, tout en renforçant les structures clandestines.
Le 27 avril 1943, Chevance échappe de justesse à la Gestapo, venue l’arrêter à son domicile. Dans un acte de bravoure, il saute par la fenêtre, se casse les deux jambes, mais parvient à s’enfuir et à disparaître dans la clandestinité. Cette évasion, la troisième après deux arrestations manquées, renforce sa légende au sein de la Résistance.
1944 : Commandement et libération
En 1944, Chevance continue de diriger les MUR en zone sud, préparant le terrain pour les débarquements alliés. Il coordonne des actions de guérilla et des parachutages d’armes, tout en maintenant des contacts avec les Forces françaises libres et les Alliés. À Toulouse, entre août et octobre 1944, il joue un rôle central dans la libération de la ville, organisant les forces résistantes pour reprendre le contrôle face aux Allemands en retraite.
Son action dans la Résistance culmine avec la libération de la France. À 35 ans, il est promu général, une reconnaissance de son engagement et de ses compétences militaires. En janvier 1945, alors que la France est largement libérée, Chevance reste actif dans la consolidation des acquis de la Résistance et la transition vers la reconstruction nationale.
Héritage et écrits
Maurice Chevance-Bertin est nommé Compagnon de la Libération, une distinction réservée aux pionniers du combat pour la liberté. Après la guerre, il raconte son expérience dans Vingt mille heures d’angoisse : 1940-1945, publié en 1990, où il détaille les défis et les sacrifices de la Résistance. Son frère, Gilbert Chevance, fut également résistant, renforçant l’engagement familial dans la lutte contre l’occupation.
Sources :
-Chevance-Bertin, Maurice. Vingt mille heures d’angoisse : 1940-1945. Robert Laffont, 1990.
-Ordre de la Libération – Biographie de Maurice Chevance-Bertin.
-Frenay, Henri. La nuit finira : Mémoires de Résistance 1940-1945. Robert Laffont, 1973.
-Archives nationales de France – Fonds de la Résistance.
-Azéma, Jean-Pierre, et Wieviorka, Olivier. Histoire de la Résistance en France. Perrin, 2013.